Page:Curwood - Kazan, trad. Gruyer et Postif.djvu/164

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lui, comme s’il espérait que Louve Grise allait apparaître. Après avoir attendu quelques minutes, il se remit en route.

Il ne tarda pas à rencontrer une piste nettement tracée. C’était celle où l’un des quatre caribous, qui étaient en train de rôtir, avait été traîné, quelques jours auparavant. Il la suivit et gagna les arbres qui bordaient la vaste clairière où s’élevait la Factorerie.

La lueur des flammes était maintenant dans ses yeux. Devant lui, la Grande Ronde se déroulait échevelée.

On aurait pu se croire dans une maison de fous. Le vacarme était réellement satanique. Léchant en bassetaille des hommes, la voix plus perçante des femmes et des enfants, les trépignements et les éclats de rire de tous, le tout accompagné par les aboiements déchaînés d’une centaine de chiens. Kazan en avait les oreilles abasourdies. Mais il brûlait d’envie de se joindre au démoniaque concert. Caché dans l’ombre d’un sapin, il refrénait encore son élan, les narines dilatées vers le merveilleux arôme des caribous qui achevaient de rôtir. L’instinct de prudence du loup, que lui avait inculqué Louve Grise, livrait en lui un dernier combat.

Tout à coup la ronde s’arrêta, le chant se tut. Les hommes, à l’aide de longs pieux, décrochèrent des broches qui les portaient les énormes corps des caribous, qu’ils déposèrent, tout ruisselants de graisse, sur le sol.

Ce fut alors une ruée générale et joyeuse de tous les convives, qui avaient mis au clair leurs coutelas ou leurs couteaux. Et, derrière ce cercle, suivit celui des chiens, en une masse jappante et grognante. Kazan, cette fois, n’y tint plus. Abandonnant son sapin, il se précipita dans la clairière.

Comme il arrivait, rapide comme l’éclair, une douzaine d’hommes de l’agent de la Factorerie, armés de