Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 1, Amyot, 1846.djvu/71

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dont il ne modérait pas toujours l’expression même en présence des commissaires de la Convention. Ceux-ci lui avaient entendu dire : « Je servais mon pays pour le défendre de l’invasion étrangère ; mais qui peut se battre pour les hommes qui nous gouvernent aujourd’hui ? »

Ces paroles, rapportées à Robespierre par Merlin de Thionville et par l’autre commissaire, décidèrent de la mort du général.

Ma mère, qui m’avait nourri, vivait retirée dans un village de Normandie, où elle se cachait avec moi, alors tout petit enfant. Sitôt qu’elle apprit le retour du général Custine à Paris, cette noble jeune femme crut de son devoir de quitter son asile, son enfant, de quitter tout, pour courir au secours de son beau-père, avec lequel sa famille était brouillée depuis plusieurs années, à cause des opinions politiques qu’il avait manifestées dès le commencement de la révolution. Elle eut peine à se séparer de moi, car elle était vraiment mère ; mais le malheur avait toujours les premiers droits sur ce grand cœur.

Elle me confia aux soins d’une berceuse née chez nous, en Lorraine, et dont la fidélité héréditaire était à toute épreuve. Cette femme devait me ramener à Paris.

Si le général Custine avait pu être sauvé, c’eût été par le dévouement et le courage de sa belle-fille.