Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 2, Amyot, 1846.djvu/148

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cial et privé de vive lumière, les illuminations sont un incendie ; on dirait que la nuit doit consoler du jour. Les arbres disparaissent sous une décoration de diamants ; dans chaque allée il y a autant de lampions que de feuilles : c’est l’Asie, non l’Asie réelle, l’Asie moderne, mais la fabuleuse Bagdad des Mille et une Nuits, ou la plus fabuleuse Babylone de Sémiramis.

On dit que le jour de la fête de l’Impératrice, six mille voitures, trente mille piétons et une innombrable quantité de barques sortent de Pétersbourg pour venir former des campements autour de Péterhoff. C’est le seul jour et le seul lieu où j’aie vu de la foule en Russie. Un bivouac bourgeois dans un pays tout militaire est une curiosité. Ce n’est pas que l’armée manque à la fête, une partie de la garde et le corps des cadets sont également cantonnés autour de la résidence souveraine ; et tout ce monde, officiers, soldats, marchands, serfs, maîtres, seigneurs, errent ensemble dans des bois d’où la nuit est chassée par deux cent cinquante mille lampions.

On m’a dit ce chiffre, je vous le répète au hasard ; car pour moi deux cent mille ou deux millions, c’est tout un ; je n’ai pas de mesure dans l’ail, mais ce que je sais, c’est que cette masse de feu jette une lumière artificielle dont n’approche pas la clarté naturelle du jour du Nord. En Russie, l’Empereur fait