Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 2, Amyot, 1846.djvu/159

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suivre l’Empereur au camp. Il y en a toujours un quelque part : ils rentrent pour danser ; et voilà comment sa journée, son année se passent, et comment ses forces se perdent avec sa vie.

Les personnes qui n’ont pas le courage ou la santé nécessaires pour partager cette terrible vie, ne sont pas en faveur.

L’Impératrice me disait l’autre jour, en parlant d’une femme très-distinguée, mais délicate ; « Elle est toujours malade ! — Au ton, à l’air dont fut prononcé ce jugement, je sentis qu’il décidait du sort d’une famille. Dans un monde où l’on ne se contente pas des bonnes intentions, une maladie équivaut à une disgrâce.

L’Impératrice ne se croit pas plus dispensée que les autres de la nécessité de payer de sa personne. Elle ne peut se résigner à laisser l’Empereur s’éloigner d’elle un instant. Les princes sont de fer !… La noble femme voudrait et croit par moments n’être pas sujette aux infirmités humaines ; mais la privation totale de repos physique et moral, le manque d’occupation suivie, l’absence de toute conversation sérieuse, la nécessité toujours renaissante des distractions qui lui sont imposées, tout nourrit la fièvre qui la mine, et voilà comment ce terrible genre de vie lui est devenu funeste et indispensable. Elle ne peut aujourd’hui ni le quitter ni le soutenir. On craint la