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Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 2, Amyot, 1846.djvu/188

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pereur laissait un prétexte aux inquiétudes, on pensa qu’on n’aurait point de tranquillité.

« Un des comtes Orlof, car dès le premier jour ce titre leur fut donné, ce même soldat surnommé le balafré, qui avait soustrait le billet de la princesse d’Aschekof, et un nommé Téplof, parvenu des plus bas emplois par un art singulier de perdre ses rivaux, furent ensemble chez ce malheureux prince ; ils lui annoncèrent, en entrant, qu’ils étaient venus pour dîner avec lui, et selon l’usage des Russes, on apporta avant le repas des verres d’eau-de-vie. Celui que but l’Empereur était un verre de poison. Soit qu’ils eussent hâte de rapporter leur nouvelle, soit que l’horreur même de leur action la leur fît précipiter, ils voulurent un moment après lui verser un second verre. Déjà ses entrailles brûlaient et l’atrocité de leurs physionomies les lui rendant suspects, il refusa ce verre : ils mirent de la violence à le lui faire prendre, et lui à les repousser. Dans ce terrible débat, pour étouffer ses cris qui commençaient à se faire entendre de loin, ils se précipitèrent sur lui, le saisirent à la gorge, et le renversèrent ; mais comme il se défendait avec toutes les forces que donne le dernier désespoir, et qu’ils évitaient de lui porter aucune blessure, réduits à craindre pour eux-mêmes, ils appelèrent à leur secours deux officiers chargés de sa garde, qui, à ce mo-