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Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 2, Amyot, 1846.djvu/225

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gnent le plus des sévérités dont ils sont forcés d’user, disent-ils, n’y renonceraient qu’à regret : au fond ils aiment les gouvernements sans contre-poids ; cela se meut plus aisément. Nul homme ne sacrifie volontiers ce qui lui facilite sa tâche. Exigez donc d’un prédicateur qu’il se passe de l’enfer pour convertir les pécheurs endurcis ! L’enfer, c’est la peine de mort des théologiens[1] : ils s’en servent d’abord à regret, comme d’un mal nécessaire, et finissent par prendre goût au métier de damner la plus grosse part du genre humain. Il en est de même des mesures sévères en politique : on les craint avant de les essayer, puis, quand on en voit le succès, on les admire ; voilà, n’en doutez pas, ce qui arrive trop souvent dans ce pays ; il me semble qu’on y fait naître à plaisir les occasions de sévir de peur d’en perdre l’habitude. Ignorez-vous ce qui se passe à l’heure qu’il est sur le Volga ?

— J’ai entendu parler de troubles graves, promptement réprimés.

— Sans doute ; mais à quel prix ? Et si je vous disais que ces affreux désordres sont le résultat d’une parole de l’Empereur…

— Jamais vous ne me ferez croire qu’il ait approuvé de telles horreurs.

— Ce n’est pas non plus ce que je veux dire ; tou-

  1. N’oubliez pas, je vous prie, que ce n’est pas moi qui parle ainsi.