Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 2, Amyot, 1846.djvu/371

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J’ai souvent lieu de vous le répéter, le peuple russe a le sentiment de ce qui prête à la peinture : parmi les groupes d’hommes et d’animaux qui m’environnaient dans cet intérieur de ferme russe, un peintre aurait trouvé le sujet de plusieurs charmants tableaux.

La chemise rouge ou bleue des paysans, boutonnée sur la clavicule et serrée autour des reins avec une ceinture par-dessus laquelle le haut de cette espèce de sayon retombe en plis antiques, tandis que le bas flotte comme une tunique et recouvre le pantalon où on ne l’enferme pas[1] : la longue robe à la persane souvent ouverte, et qui, lorsque l’homme ne travaille pas, recouvre en partie cette blouse, les cheveux longs des côtés séparés sur le front, mais coupés ras par derrière un peu plus haut que la nuque, ce qui laisse à découvert la force du col : tout cet ensemble ne compose-t-il pas un costume original et pittoresque ?….. L’air doux et sauvage à la fois des paysans russes n’est pas dénué de grâce : leur taille élégante, leur force qui ne nuit pas à la légèreté, leur souplesse, leurs larges épaules, le sourire doux de leur bouche, le mélange de tendresse et de férocité qui se retrouve dans leur regard sauvage et triste, rend leur aspect aussi différent de celui de nos laboureurs que les

  1. Voir Lettre dix-huitième la description du costume de Fedor par le prince***, dans l’histoire de Telenef.