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Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 2, Amyot, 1846.djvu/65

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mirateurs. Le commencement de son règne lui a déjà valu de justes louanges ; elle s’est encore élevée à la même hauteur à l’époque du choléra, et même plus haut ; car à cette seconde émeute, Votre Majesté a déployé la même autorité, mais tempérée par le plus noble dévouement à l’humanité ; la force ne lui manque jamais dans le danger.

— Les moments dont vous me retracez le souvenir ont été les plus beaux de ma vie, sans doute, néanmoins ils m’ont paru les plus affreux.

— Je le comprends, Sire ; pour dompter la nature en soi et dans les autres, il faut un effort…

— Un effort terrible, interrompit l’Empereur avec une expression qui me saisit, et c’est plus tard qu’on s’en ressent.

— Oui ; mais on a été sublime.

— Je n’ai pas été sublime ; je n’ai fait que mon métier : en pareille circonstance nul ne peut savoir ce qu’il dira. On court au-devant du péril sans se demander comment on s’en tirera.

— C’est Dieu qui vous a inspiré, Sire, et si l’on pouvait comparer deux choses aussi dissemblables que poésie et gouvernement, je dirais que vous avez agi comme les poëtes chantent : en écoutant la voix d’en haut.

— Il n’y avait nulle poésie dans mon fait. »

Je m’aperçus que ma comparaison n’avait pas paru