de ses forces, il sera enclin à prendre de son talent des idées exagérées, et n'hésitera point li les exprimer avec franchise.
Ce qu'un tel jeune homme devrait devenir, M. Adanson le devint ; ceux qui l'ont connu ont dû observer en lui tout ce qu'il y a de bon et de mauvais dans ce portrait, et de ce caractère une fois donné se déduit presque nécessairement le sort de ses ouvrages et celui de sa personne.
De retour en Europe, le 18 février 1754, avec sa riche provision de faits et de vues générales, il chercha aussitôt à prendre parmi les naturalistes le rang qu'il croyait lui appartenir.
L'état de lhistoire naturelle avait notablement changé pendant son absence. Réaumur était près de mourir. Ses ingénieuses recherches n'avaient dans de Geer qu'un continuateur faible et moins heureusement placé. Mais Linnæus et Buffon commençaient à se frayer le chemin vers l'empire qu'ils se sont partagé pendant près d'un demi-siècle.
L'un, d'un esprit perçant, d'une application opiniâtre, embrassant toutes les productions de la nature, les contraignait en quelque sorte dans les classifications arbitraires, mais précises et faciles à saisir ; leur imposait des noms étranges, mais invariables et commodes à retenir ; les décrivait dans un langage néologique, mais court, expressif, et d'une signification rigoureusement fixée. L'autre, d'une imagination élevée, grave et imposant dans son style comme dans ses manières, s'at -