Page:Cuvier - Recueil des éloges historiques vol 1.djvu/245

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

tachant à un moindre nombre d'êtres, négligeant ces échafaudages artificiels que l'étude de productions plus nombreuses aurait exigés, épuisait, pour ainsi dire, chacun des sujets qu'il traitait : il en traçait des tableaux animés ; la pompe et la majesté de la nature régnaient dans leur ordonnance, son éclat et sa fraîcheur dans leur coloris ; ils étaient liés par des vues neuves, hardies, quelquefois téméraires mais toujours exposées avec un art entraînant.

Les livres de Linnæus, renfermant sous un petit volume une immense série d'êtres de toutes les classes, étaient le manuel des savants ; ceux de Buffon, offrait dans une suite de portraits enchanteurs un choix des êtres les plus intéressants, faisaient le charme des gens du monde : mais tous les deux, presque exclusivement livrés à leurs idées particulières, avaient trop négligé un point de vue essentiel, l'étude de ces rapports multipliés des êtres d'où résulte leur division en familles fondées sur leur propre nature ; et c'était précisément là ce qu'avait fait le principal sujet des méditations de M. Adanson dans sa solitude.

Il en développa le premier avec énergie toute l'importance, et en suivit très-loin l'application. La hardiesse de sa marche, la précision de ses résultats frappèrent les naturalistes, au point qu'ils crurent un instant voir en lui un digne rival de ces deux grands maîtres ; et peut-être n'a-t-il, en effet, manqué à sa réputation, pour approcher de la leur, qu'un aussi heureux emploi des moyens accessoires dont ils surent si bien se servir.