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avons pu en rectifier quelques-uns, non pas, hâtons-nous de le dire, dans une vue de critique, mais uniquement dans l’intérêt de la vérité. Nous comprenons aisément que les premiers navigateurs qui abordèrent à Tahiti se soient laissés entraîner par les élans d’une imagination charmée par les sites nouveaux et enchanteurs de l’océanien.

C’est à cet enthousiasme, sans doute, qu’il faut rapporter la présence des charmantes bruyères qui tapissent la vallée de Matavai. C’est à des récits que le temps n’aura pas permis de contrôler, que nous devons ces étranges assertions : que l’isthme qui joint Tahiti à sa presqu’île était recouvert par les hautes marées, et qu’on pouvait dans ces moments le traverser en pirogue[1], qu’on dormait à l’ombre des ananas[1] ; que l’arbre à pain donnait des fruits pendant huit mois consécutifs[1] ; que ces fruits pesaient quelquefois cinquante livres[2] ; qu’après la cuisson on les conservait quatre ou cinq mois…, que le saule-pleureur était la salle à manger des rois[3] ; enfin que le kava était une boisson alcoolique tellement repoussante, que les matelots Européens les plus passionnés pour les liqueurs fortes n’ont jamais pu se résoudre à en boire[4].

Notre but a été surtout de créer des ressources au commerce et à l’industrie ; de procurer des frets de retour aux navires qui vont dans ces parages et qui sont forcés, le plus souvent, de s’en revenir sur lest.

Étudier les productions et la nature du sol, chercher à établir des industries capables d’améliorer le sort des naturels ; telle est, selon nous, la véritable manière de comprendre une colonisation.

Nous avons examiné au point de vue de l’analyse chimique : des racines, des écorces, des bois, des gommes, que presque tous les arbres fournissent ; nous avons extrait des huiles d’une grande quantité de graines qui se perdent ; nous nous sommes occupé enfin des substances tinctoriales du pays.

  1. a, b et c Rienzi. Océanie.
  2. Lesson.
  3. Bougainville.
  4. D’orbigny. — Dict. d’hist. natur., t. 10, p. 360.