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Page:Cyrano de Bergerac - Œuvres, 1676, volume 1.djvu/37

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ſon dépit paſſe encore plus outre, car elle tâche d’empoiſonner ceux qui ne ſont pas morts de faim, & je n’avance rien que je ne prouve. N’eſt-il pas vray que ne nous reſtant plus rien de pur entre tant de choſes dont l’uſage nous eſt neceſſaire, ſinon l’air, la Maraſtre l’a ſuffoqué de Contagion ? Ne voyez-vous pas comme elle traîne la peſte, cette maladie ſans queuë, qui tient la mort penduë à la ſienne en toutes les Villes de ce Royaume ? comme elle renverſe toute l’œconomie de l’Univers & de la ſocieté des hommes, juſqu’à couvrir de pourpre des miſerables ſur un fumier ; & jugez ſi le feu dont elle s’allume contre nous eſt ardent, quand il ſuffit d’un charbon ſur un homme pour le conſumer.

Voila, Monſieur, les treſors & l’utilité de cette adorable Saiſon, par qui vous penſiez avoir trouvé le ſecret de la Corne d’abondance. En vérité ne merite-t’elle pas bien mieux des Satyres que des Eloges, & ne devrions-nous pas meſme deteſter les autres, à cauſe qu’elles ſont en ſa compagnie, & qu’elles la ſuivent toûjours & la precedent ? Pour moy, je ne doute point qu’un jour cette enragée ne pervertiſſe toutes ſes compagnes ; & en effet, nous obſervons qu’elles ont déja toutes, à ſon exemple, leur façon