Page:Cyvoct - Souvenirs de madame Recamier.djvu/78

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tain malaise. Le concert achevé, il vint à elle et lui dit : « Vous aimez bien la musique. Madame ? » Il se disposait à continuer la conversation ainsi entamée, notais Lucien survint, Napoléon s’éloigna et Mme Récamier rentra chez elle. On verra plus tard que ces relations fugitives avaient pourtant laissé une impression et un souvenir à Napoléon, et qu’il essaya de fixer à sa cour la beauté qui l’avait ému.

Pour donner une idée vraie de l’existence de Mme Récamier et pour faire comprendre le rôle qu’elle a occupé dans la société de son temps, il faudrait peindre cette belle et si jeune personne groupant autour d’elle par le sentiment de l’admiration qu’elle inspirait les éléments dispersés de l’ancienne aristocratie et les hommes nouveaux que le talent, l’énergie du caractère ou la gloire militaire avaient mis au premier rang dans cette société qui se reconstituait. On voyait en effet tout à la fois chez elle et les émigrés à mesure que leur radiation des listes permettait leur rentrée en France : le duc de Guignes, Adrien et Mathieu de Montmorency, Christian de Lamoignon, M. de Narbonne ; Mme de Staël, Camille Jordan et bien d’autres dont les noms ne me reviennent pas en ce moment ; Barrère, Lucien Bonaparte, Eugène Beauharnais, Fouché, Bernadotte, Masséna, Moreau, les généraux de la révolution, les membres des assemblées ou du tribunat ; M. de La Harpe, Lemontey, Le-