Page:Cyvoct - Souvenirs de madame Recamier.djvu/84

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Mathieu de Montmorency et sa nouvelle amie. Il aima en elle ces dons heureux que la Providence accorde rarement au degré où elle les possédait, la pureté de l’âme, une bonté pour ainsi dire céleste et un cœur à la fois fier, haut et tendre.

L’amitié de Mathieu pour Mme Récamier fut d’autant plus vive qu’elle ne fut jamais exempte d’inquiétudes. Il vivait dans la préoccupation constante des périls que faisaient courir à cette âme si précieuse un désir de plaire dont il ne pouvait la guérir et tant d’hommages frivoles mais enivrants, intéressés à sa perte. Il l’aimait en père et veillait avec une sollicitude jalouse sur les sentiments qu’elle pouvait éprouver. Ses consolations, ses conseils, ses pieux encouragements l’associèrent à toutes les circonstances tristes ou dangereuses de la vie de Mme Récamier : il eut souvent à ranimer son énergie dans des moments de découragement et de dégoût, très-fréquents dans une existence à la fois vide et brillante. M. de Montmorency sentait bien que ce besoin d’être admirée et cette absence des affections intimes du foyer domestique étaient des écueils redoutables pour la vertu de sa charmante amie ; aussi se montre-t-il dans toute sa correspondance préoccupé de lui en faire comprendre le danger. J’aurai plus d’une occasion de citer à leur date quelques-unes des lettres de Mathieu de Montmorency, monument unique d’une affection dont la pureté et