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Page:Cyvoct - Souvenirs de madame Recamier.djvu/93

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de l’imagination qui prennent dans de certaines âmes une si cruelle intensité, elle était la sœur de charité par excellence. Outre tous les dons charmants que le ciel lui avait faits et qui expliquent de reste l’attrait qu’elle inspirait, elle avait deux qualités bien rares : elle savait écouter et s’occuper des autres.

L’attachement de Mme Récamier pour M. de La Harpe était sincère et datait de l’enfance : elle admirait son talent, elle appréciait son esprit, et eut toujours pour lui les plus gracieuses attentions. Il passait de longues semaines à Clichy et venait à Paris dîner très-habituellement chez M. Récamier. Lorsqu’il rouvrit à l’Athénée ses cours interrompus, la belle Juliette assistait fidèlement à toutes ses leçons dans une place que M. de La Harpe faisait garder tout auprès de sa chaire ; l’intérêt avec lequel il était écouté par cette personne si intelligente et si fort à la mode le flattait au dernier point ; il était d’ailleurs bien sûr que l’espérance toujours réalisée de la voir attirerait à son cours un public d’autant plus nombreux.

Tant de jeunesse et d’attentive bonté avait inspiré à M. de La Harpe un sentiment de reconnaissance qui véritablement le transformait. Malgré la sincérité de sa conversion, il était resté irascible, facilement impertinent et toujours un peu dédaigneux. Il fut constamment doux et aimable avec Juliette. M. Ré-