Page:Cyvoct - Souvenirs de madame Recamier.djvu/95

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chambre à coucher même. Toute une histoire avait été préparée pour motiver une intrusion aussi imprévue. On arrivait de Paris, on avait un service pressant à demander, on n’avait pu se décider à attendre au lendemain. Bref M. de La Harpe, le soir, se retire du salon et monte dans son appartement. De curieux et mystérieux auditeurs étaient déjà à l’affût derrière les paravents pour jouir de la scène. Mais quel fut l’étonnement, le regret, un peu le remords de cette folâtre jeunesse, y compris la soi-disant dame, assise au coin de la cheminée#1, de voir M. de La Harpe, en entrant, ne regarder à rien et se mettre simplement à genoux pour faire sa prière, une prière qui se prolongea longtemps !

« Lorsqu’il se releva, et qu’approchant du lit, il avisa la dame, il recula de surprise : mais celle‑ci essaya en vain de balbutier quelques mots de son rôle ; M. de La Harpe y coupa court, lui représentant que ce n’était ni le lieu ni l’heure de l’entendre, et il la remit au lendemain en la reconduisant poliment. Le lendemain, il ne parla de cette visite à personne dans le château, et personne aussi ne lui en parla. »

L’optimisme de M. Récamier le poussait volontiers à se mêler de mariages : il y avait la main malheu-[1]

  1. Elle était dans l’alcôve.