Page:D'Hervey de Saint-Denys - Les Rêves et les moyens de les diriger, 1867.djvu/163

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et qu’il a faite autant et plus même pour d’autres encore. Ainsi le sommeil est le sommeil du corps ; mais il agit sur l’âme par une occasion si merveilleusement ménagée qu’on pourrait croire que la distraction de l’âme et l’oubli de la réalité sont le but direct du sommeil des organes.

« Si les actions de l’âme sont plus faibles, ses sensations plus lourdes, ses pensées plus indécises, c’est à la torpeur des organes qu’il faut en attribuer la cause, mais l’esprit ne connaît pas le sommeil. » (Page 58) [1]

A mesure que l’on avance dans l’examen de ces questions si complexes, on se voit entraîné à traiter

  1. Déjà Jouffroy avait abordé remarquablement celle question dans le passage suivant :
    « Dans l’état de pure rêverie, nom laissons aller notre esprit à son gré ; il part de l’idée qui l’occupait au moment où nous lâchons les rênes, et celle-là lui en rappelant une autre, celle-ci une troisième, cette troisième une quatrième, et ainsi de suite, il voyage ainsi à l’aventure et parcourt une série de pensées qui n’ont entre elles d’autres liens que les capricieuses associations qui les ont amenées à la file dans la mémoire,… C’est là, pour notre esprit, sa manière de se reposer ; il n’en a pas d’autres. Ce qui le fatigue, ce n’est pas l’activité ; l’activité est son essence ; l’absence de l’activité ne serait pas pour lui le repos, mais la mort. Ce qui le fatigue, c’est la direction de son activité, c’est la concentration de ses facultés sur un sujet. Cette concentration, qu’on appelle attention, le fatigue, parce qu’elle est un effort étranger à son allure naturelle. Il travaille toute la journée comme le corps ; mais quand vient la nuit, il se sent fatigué comme son compagnon, et convié au repos par l’assoupissement des organes ; il s’abandonne à sa libre nature. Quelquefois aussi, il se donne congé pendant le jour ; et il a bien conscience de l’identité de ces deux états, qu’il appelle l’un l’état de rêve et l’autre l’état de rêverie. »