Page:D'Hervey de Saint-Denys - Les Rêves et les moyens de les diriger, 1867.djvu/315

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son étonnement, plusieurs années ensuite, de retrouver ce morceau dans un recueil de musique ancienne, tombé par hasard entre ses mains ! En vain chercha-t-il à se remémorer quand et comment la lecture ou la première audition en avait été par lui faite ou perçue. Ce souvenir, si nettement ravivé sous l’empire du songe, ne se révélait pas même de la façon la plus vague à l’esprit de l’homme éveillé.

J’ai recueilli moi-même bon nombre d’exemples du même genre, moins saisissants, mais non moins authentiques. C’est que, pour être complètement introuvables à l’état de veille, les réminiscences qui se sont ravivées durant le songe n’en existaient pas moins cachées dans quelque coin reculé des magasins de la mémoire. Un capricieux enchaînement d’idées a jeté tout à coup sur elles une lueur rapide comme un éclair, et, cette lueur passée, elles se sont évanouies de nouveau, ainsi que les buissons perdus de la campagne qu’un instant la foudre illumine par une nuit d’orage, mais qui rentrent aussitôt dans l’obscurité.

Combien de traits de mémoire analogues l’esprit de chacun de nous ne doit-il pas accomplir, en ce qui regarde l’immense famille des souvenirs acquis par le sens de la vue ? Qui de nous, frappé de l’étrangeté de quelque visage ou de quelque tableau, qu’il vient d’apercevoir en songe et qu’il