Page:D'Hervey de Saint-Denys - Les Rêves et les moyens de les diriger, 1867.djvu/348

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

concours le prix décerné plus tard à M. Lemoine.

Voici d’abord ce que me raconta le joueur d’échecs :

Avant de se coucher et de s’endormir, il s’était inutilement efforcé de résoudre un problème difficile, un mat en six coups dans des conditions exceptionnelles. Il rêve que l’échiquier est toujours devant ses yeux ; il revoit chaque pièce à son poste ; il continue d’étudier : mais cette fois la solution cherchée lui apparaît avec une lucidité merveilleuse. La partie marche et s’achève ; il a vu successivement et très nettement la physionomie de l’échiquier après chaque mouvement ou chaque prise. Il se réveille fort étonné, ayant encore si bien présente à l’esprit la dernière combinaison qu’il ne résiste pas au désir d’en vérifier immédiatement la justesse. Il se lève donc, il dispose l’échiquier, remonte dans ses souvenirs et constate l’exactitude du résultat.

A quoi tient surtout la supériorité de certains joueurs, tels que La Bourdonnais, Murphy, etc. ? À l’aptitude que possède leur esprit d’embrasser un très grand nombre de combinaisons possibles, pour ainsi dire d’un seul coup d’œil de la pensée, comme un général qui non seulement reconnaîtrait de loin tous les accidents de terrain d’un champ de bataille et toutes les ressources de l’ennemi,