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Page:D'Isle - Deux cœurs dévoués, 1875.djvu/147

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DEUX CŒURS DÉVOUÉS.

qu’elle fît le bien, elle le lui laissait accomplir suivant sa nature ; elle eût craint de comprimer, par trop de culture, le caractère vif et expansif de Cora ; elle aimait cette spontanéité de résolution, cette rapidité de mouvement, et surtout le sourire toujours éclos sur les lèvres roses de sa fille. Le rire va si bien à la jeunesse !

Cora ne possédait pas, comme la marquise, cette tendresse céleste d’un cœur qui se répand incessamment sur tous, mais elle était bonne, généreuse, compatissante, et on pouvait prévoir que si jamais elle devait connaître ces épreuves, dont la richesse et même la vertu ne garantissent pas toujours, son âme trouverait, pour combattre les douleurs de la terre, une force entretenue et augmentée par la pensée du ciel.

René de Méligny, à dix ans, n’était encore qu’un enfant beau comme les anges de Raphaël, mélancolique et pensif comme eux. Si Cora, avec ses yeux veloutés, ses cheveux noirs et sa fierté candide, ressemblait à son père, René, avec son regard limpide, la délicatesse de ses traits, la douceur de son sourire, était l’image de sa mère. Il avait pour elle un culte passionné, qui remplissait parfois ses grands yeux de larmes soudaines quand il la regardait.

On peut penser que ce fut un bien triste jour que celui où ce tendre et charmant René fut con-