teur ! s’écria-t-elle, je suis injuste de tant souffrir quand vous me restez.
— Chère femme, lui dit doucement M. de Méligny, il ne faut pas pleurer Cora comme si elle était perdue pour nous ; elle est heureuse, elle reviendra, et d’ailleurs, n’avons-nous pas René ?
— Ah ! René, sans doute, pauvre enfant bien-aimé, mais la guerre est déclarée, hélas ! le bon Dieu sait ce que le ciel nous réserve.
— Béatrice, reprit le marquis, vous n’avez pas le droit de douter de la bonté du ciel.
— C’est vrai, car vous êtes mon époux, et j’ai des enfants excellents. Ô mon ami, reprit-elle après un long silence, je songe parfois que j’ai derrière moi vingt-cinq ans de bonheur, et j’ai peur !
— C’est votre première épreuve, mon amie, supportez-la avec courage et résignation. »
Quelques jours après le départ de Cora, le jeune comte vint à Morancé faire ses adieux à sa mère ; le commencement de la guerre d’Italie rappelait René sous les drapeaux, comme l’avait prévu la marquise.
Il dissimulait mal une sorte de joie fière qu’il éprouvait à la pensée de la guerre prochaine.
Le jour de son départ, il dit, en embrassant tendrement la marquise :
« Adieu, ma mère bien aimée ; je reviendrai commandant, ou…