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Page:D'Isle - Deux cœurs dévoués, 1875.djvu/290

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DEUX CŒURS DÉVOUÉS.

sa femme de chambre, sur une chaise longue, et resta dans l’ombre à veiller cette pauvre femme comme un enfant.

Elle demeura longtemps sans faire un mouvement, sans pouvoir prononcer une parole ; le curé vint s’asseoir auprès d’elle, il essaya de la consoler ; mais console-t-on de pareilles douleurs ?

Le vieillard s’efforçait de lui donner du courage, et quelques phrases seulement arrivaient à l’oreille de la marquise.

« Vous vous devez à votre mari, à votre fille. Tout est-il à jamais éteint dans votre cœur avec… avec… »

Il se mit aussi à pleurer.

« Ah ! oui, répétait-il en manière de consolation, sans penser qu’il pouvait augmenter les regrets de la mère, ah ! c’était une belle âme, une grande âme, un vrai gentilhomme pour l’honneur et la bravoure ; il était bien de vous, madame, et si jeune ! mourir si jeune ! si plein de vie, de santé. Oh ! la guerre ! c’est affreux : les balles ne choisissent pas ; que leur importent les mères ? Hélas ! »

Béatrice l’écoutait lorsqu’il parlait ainsi.

Le marquis sortit de la chambre lorsqu’il crut sa femme plus calme. On arrivait pour ensevelir René. Comme si Béatrice eût deviné ce qu’on allait faire ; elle se leva tout d’un coup, ouvrit précipitamment la porte, entra dans la chambre en criant :