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Page:D'Isle - Deux cœurs dévoués, 1875.djvu/291

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DEUX CŒURS DÉVOUÉS.

« Une dernière fois ! une dernière fois ! laissez-moi l’embrasser ! »

Le jeune homme reposait déjà dans sa bière ; elle souleva le drap mortuaire et se pencha pour baiser son front.

Le marquis crut qu’elle était morte dans cette horrible étreinte, en voyant ses bras se roidir autour du corps ; il l’emporta chez elle ; le médecin arriva : elle n’était qu’évanouie.

Quand elle revint à elle, la tombe venait d’être fermée à jamais sur la dépouille de cet être si noble, si tendre, si généreux, qu’on appelait René de Méligny.

Si l’affliction de Béatrice fut immense, profonde, folle, celle de son mari ne fut pas moins grande. Il versa moins, le premier jour, le flot de sa douleur ; mais elle s’amassa au fond de son cœur et ne le quitta plus.

Il avait vu enlever le dernier descendant de sa race par la mort, à un âge où l’on ne prévoit jamais qu’elle puisse frapper ; il avait vu en un instant détruits tous ses rêves d’orgueil et d’avenir ; non-seulement il regrettait son fils, mais il craignait encore pour Béatrice.

Pendant huit jours, l’affliction du marquis ne parvint pas à faire parler cette ombre éplorée qui était sa femme.

Le nom de René ne fut pas prononcé entre eux ;