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Page:D'Isle - Deux cœurs dévoués, 1875.djvu/293

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DEUX CŒURS DÉVOUÉS.

mière fois, celle qu’on avait tant admirée et tant bénie, on la plaignait.

Tous les soirs, elle passait, appuyée sur le bras de son mari : elle allait prier dans la petite église, aux pieds de cette Vierge qui vit mourir son fils ; puis elle entrait dans le cimetière pour déposer sur un tombeau de marbre un bouquet de fleurs. Elle restait longtemps à genoux dans le caveau funèbre, les mains entrelacées à la croix, s’entretenant tout bas avec son fils bien-aimé, jusqu’à ce que le marquis la relevât doucement et, repassant sous son bras, son bras tremblant, la reconduisît au château.

Elle écrivit à sa fille, en la suppliant de revenir ; elle avait besoin de ce lien pour la rattacher à la vie. Au mois de décembre, elle retourna à Paris, ne reçut que quelques amis, qui vinrent presque tous les soirs lui tendre leurs mains sympathiques. Un jour, en levant les yeux sur son mari, elle fut effrayée du changement qui s’était opéré en lui. Les cheveux du marquis avaient tous blanchi ; son front s’était creusé, des rides profondes sillonnaient son visage, un cercle noir entourait ses yeux.

Elle pensa à la bonté, au dévouement de ce pauvre père, souffrant sans se plaindre et dominant son propre cœur pour essayer de la consoler ; elle sentit qu’elle devait se résigner et renfermer