Aller au contenu

Page:D'Isle - Deux cœurs dévoués, 1875.djvu/79

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
73
DEUX CŒURS DÉVOUÉS.

au prix d’un sacrifice de vanité ; pour donner une habitation, des meubles, des rentes à ses chers protégés, la marquise avait vendu un jour cent cinquante mille francs de diamants.

Le marquis avait fait en vain des objections à cette résolution ; mais ses instances l’avaient fléchi.

Cette belle œuvre de charité était devenue la cause de ses plus douces joies ; au bout d’un an, il se trouvait déjà dans la maison vingt petits orphelins, instruits, nourris, aimés, grâce à Béatrice : elle comptait onze petites filles et neuf petits garçons dans les dortoirs, où les chers innocents s’endormaient sous le regard de la Vierge mère.

La classe les réunissait autour d’une jeune maîtresse qui les instruisait sans jamais les punir ; toute rigueur eût été inutile, car chaque matin la marquise, après les avoir visités, leur laissait dans le cœur de si douces paroles, qu’ils restaient sages tout le jour.

Ce matin-là, cependant, il régnait une grande agitation dans la classe ; on regardait avec impatience la pendule : ces mutines petites têtes étaient littéralement cachées derrière des bottes de fleurs : on s’agitait tumultueusement sur les bancs ; on répétait : Madame ne vient pas ! Un ou deux des plus petits commençaient même à pleurer d’impatience, quand la porte s’ouvrit, et la marquise de Méligny parut.