Mais, hélas ! bien souvent en civilisation, son conducteur, ignorant de toutes les sciences ou préoccupé d’intérêts mercantiles, ne peut ou ne veut lui donner les explications qu’il sollicite. Si l’enfant insiste, on le gronde, on le menace de ne plus le faire sortir une autre fois. On lui ferme ainsi la bouche, on arrête violemment l’expansion de son intelligence, on la musèle. Et quand l’enfant a été bien docile tout le long du chemin, qu’il s’est tenu coi dans sa peau, et n’a pas ennuyé papa et maman de ses importunes questions ; quand il s’est laissé conduire sournoisement ou idiotement par la main, comme un chien en laisse ; alors on lui dit qu’il a été bien sage, bien gentil, et, pour le récompenser, on lui achète un soldat de plomb ou un bonhomme de pain d’épice. Dans les sociétés bourgeoises cela s’appelle former l’esprit des enfants. — Oh ! l’autorité ! oh ! la petite famille !… Et personne sur les pas de ce père ou de cette mère pour crier : Au meurtre ! au viol ! à l’infanticide !…
Sous l’aile de la liberté, au sein de la grande famille, au contraire, l’enfant, ne trouvant partout chez ses aînés, hommes ou femmes, que des éducateurs disposés à l’écouter et à lui répondre, apprend vite à connaître le pourquoi et le comment des choses. La notion du juste et de l’utile prend ainsi racine dans son juvénile entendement et lui prépare d’équitables