les lui rendre ? Ignorez-vous que la même loi qui
le priverait des exemptions dont il jouit, privera
aussi vos pourvoyeurs de celles dont il les fait
jouir. Car personne n’est assez simple pour croire
qu’il vous laissera les privilèges que vous tenez de
lui, lorsque vous lui retirerez ceux qu’il tient de
vous. Outre plusieurs préjudices que vous porterait
la loi, elle vous dépouillerait donc d’une partie de
vos ressources actuelles. Et vous délibérez encore
si vous la rejeterez ! et vous n’êtes pas déterminés
il y a long-tems ! Greffier, prenez les décrets mêmes
portés en faveur de Leucon, et faites-en lecture.
Vous voyez, Athéniens, par les décrets, que c’est avec justice que Leucon a obtenu les exemptions. Pour attester les privilèges que vous vous êtes accordés mutuellement, vous avez érigé, vous et lui, des colonnes, une au Bosphore, une autre au Pirée, et une troisième au temple des Argonautes [9]. Or, voyez de quelle infamie vous couvre une loi qui rend tout un peuple moins fidèle et moins sûr qu’un seul homme. Car ne pensez pas que les colonnes aient été érigées à d’autres fins, que pour être les garans communs de nos exemptions réciproques. On verra donc que Leucon remplit ses engagemens avec fidélité, qu’il continue à vous servir avec zèle, tandis que vous rendrez inutiles les colonnes toujours subsistantes ; ce qui sera