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baisers comme une aumône. Mais il n’ouvrait la bouche que pour crier.

Chaque soir, il allait baguenauder avec des copains. Elle n’était pas jalouse de ses relations, et d’ailleurs elle ne pouvait pas l’empêcher de sortir. Elle restait dans sa chambre avec ses souvenirs ; elle songeait à son amant, à leur vie commune où tout les séparait. Elle enviait les femmes mariées. Il lui manquait quelque chose à elle, l’âge, la fatigue, creusaient déjà ses traits. Elle soupirait « Je suis trop laide » regardait ses mains noires et crevassées. Enfin, après un dernier coup d’œil sur le « réveil », elle se couchait.

Un jour, elle se décida à faire comme Trimault, à garder pour elle le salaire de son travail. Ce fut une scène terrible.

— Grosse garce, cria Pierre, c’est comme ça que tu me remercies de t’avoir tirée du fumier !

Il la gifla, puis sortit en claquant la porte. Renée était habituée aux injures ; elle accepta aussi les coups. « C’est la vie, » se dit-elle.

Trimault enragea quand il la sut enceinte. Ah ! Non ! Ce n’est pas à son âge qu’on se laissait attacher un fil à la patte. Après