Page:Dabit - L'hotel du nord, 1929.djvu/70

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tout, il ne l’avait pas eue vierge. S’il la lâchait ?

Cette menace anéantissait ce qui restait de leur bonheur. La nuit, dans la chambre où tout lui rappelait un passé de discorde, Renée, inquiète, ne pouvait s’endormir. Son amant sommeillait. Elle sentait un abîme se creuser entre eux et un cri lui échappait, dans lequel elle mettait tout son cœur.

— Pierre, à quoi penses-tu ? Parle-moi… Oh ! tu ne m’aimes plus.

— Fous-moi la paix avec tes boniments. J’ai sommeil.

Il lui tournait le dos. Renée sanglotait et se cachait le visage dans l’oreiller. Comme emportées par un grand vent, ses illusions fuyaient une à une. Elle pensait à sa journée de travail, elle se voyait lavant les couloirs, changeant des draps et des serviettes sales, trimbalant des seaux dont le poids lui tirait le ventre. Jamais elle n’en finissait avec son ouvrage. Et lorsqu’elle avait le malheur de se plaindre, Trimault la rembarrait ! Il se conduisait comme une brute, il était prêt à l’abandonner…

Un soir, il ne rentra pas. Anxieuse, Renée courut les bistrots du quartier. Les boutiques