Page:Dablon - Le Verger, 1943.djvu/104

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

une lettre cachetée à Mademoiselle ; cette fois, vous lui signifierez l’interruption de vos relations épistolaires.

Il tira sa montre et regarda Jacques ; ses yeux couleur d’ivoire exprimaient la mansuétude.

— Il ne vaut pas la peine de retourner à l’étude. Réfléchissez à ce que je vous ai dit.

Jacques inclina la tête et sortit. Il aurait pleuré de rage ; il cherchait à déglutir une salive qui ne coulait pas.

À la fin du souper, il jeta un regard du côté des petits ; André lui faisait signe qu’il voulait le rencontrer après le repas ; le gamin était court d’argent sans doute. Jacques fit mine de ne pas comprendre et plongea au plus profond de sa superbe. Il aurait voulu que tout le monde souffrît avec lui.



Le lendemain, quand Jacques entre en classe, Marc Richer lui sourit de sa grande bouche en éventaire, et fouille dans la poche intérieure de son veston : double signal d’une lettre. À quoi bon ? Ne vaut-il pas mieux renoncer à cette équipée ? Jacques prend son siège, à deux bancs de Richer, devant Saint-Denis, et Monsieur Legris, le professeur de chimie, fait son entrée. Monsieur Legris n’omet pas un seul des rites que comporte toute entrée en classe : il dépose sur la table sa serviette de cuir pelé, sort trois bouts de craie, un jaune, un orangé et un blanc, écrase dans son mouchoir ses doigts corrodés et, de ses yeux myopes, lance aux élèves un regard de défi.