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bienfaits de la Rédemption du monde. C’est l’ordre de Dieu. Nous ne pouvons pas être sourds à son appel. Il faut répandre la religion et évangéliser tout le monde. »

Pour sa part, il commença aussitôt à annoncer la bonne nouvelle. Il s’adressa d’abord à quelques-uns de ses amis, de la classe moyenne, distingués par leurs connaissances et leur bonne conduite. Plusieurs se rendirent presque immédiatement a sa parole vive et pénétrante ; c’étaient entre autres T’soi T’sang-hien-i, T’soi In-kin-i, et Kim Tsong-kio. Piek-i prêcha aussi la religion à plusieurs nobles qui l’embrassèrent. Fidèle à sa mission, il ne se donnait pas de relâche ; il allait de côté et d’autre annonçant partout l’Évangile. Ses succès firent assez de bruit pour éveiller la susceptibilité des lettrés païens, qui comprenaient instinctivement que la nouvelle doctrine sapait par la base leurs croyances nationales. Plusieurs d’entre eux essayèrent tout d’abord de convaincre d’erreur les prédicateurs de l’Évangile, et de les ramener à la religion des lettrés. Le premier qui fit cette tentative fut Ni Ka-hoan-i. Issu d’une famille distinguée, il comptait, parmi ses ancêtres et ses parents, plusieurs docteurs fameux, et lui-même, quoique jeune encore, avait déjà beaucoup de réputation. Apprenant la propagation rapide de la religion, il dit : « C’est ici une très-grande affaire. Quoique cette doctrine étrangère ne paraisse pas déraisonnable, ce n’est pas cependant notre doctrine des lettrés ; et puisque Piek-i veut par là changer le monde, je ne puis rester immobile. J’irai donc et je le ramènerai dans la bonne voie. » On fixa le jour de la conférence. Les amis des deux docteurs et une foule de curieux se réunirent chez Piek-i pour assister à cette discussion solennelle. Ka-hoan-i essaya tout d’abord de faire revenir Piek-i de ce qu’il appelait ses erreurs. Il se croyait sûr de la victoire, mais chacune de ses assertions était relevée par son adversaire qui les réfutait article par article, et qui, le poursuivant jusque dans les plus petits détails, détruisait et réduisait en poudre tout l’édifice de ses raisonnements. En vain s’épuisait-il à le relever, tous les coups de Piek-i frappaient juste. Toujours d’accord avec lui-même, il n’avançait rien sans le prouver. Sa parole claire et lucide, disent les relations coréennes, portait partout la lumière ; son argumentation était brillante comme le soleil ; elle frappait comme le vent, et tranchait comme un sabre.

Les nombreux spectateurs de ce combat singulier jouirent alors d’un beau spectacle. C’était un des coryphées de la vieille école, un champion des ténébreuses doctrines chinoises, aux prises