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fidèles. Ces sacrements sont les seuls que nous trouvions mentionnés dans les mémoires du temps. Le baptême donné par ces pasteurs était évidemment valide, et conférait la grâce de la régénération. Les autres sacrements qu’ils administraient étaient évidemment nuls. Néanmoins, il est certain que leur ministère réchauffa partout la ferveur, et donna un nouvel élan à la propagation de la foi dans tout le royaume. On parle encore de l’enthousiasme des chrétiens, de leur sainte ardeur pour assister aux cérémonies et pour recevoir les sacrements. La grand’mère du célèbre martyr André Kim, le premier prêtre indigène de la Corée, a raconté que Louis de Gonzague Ni, son oncle, par qui elle avait été baptisée, se servait d’un calice d’or pour célébrer le sacrifice. Les ornements sacrés étaient confectionnés avec de riches soieries de Chine. Ils n’avaient pas la forme de nos chasubles, mais ils étaient semblables à ceux dont les Coréens font usage dans leurs sacrifices. Les prêtres portaient le bonnet usité en Chine, dans les cérémonies du culte catholique. Pour entendre les confessions des fidèles, ils se plaçaient sur un siège élevé sur une estrade, et les pénitents se tenaient debout devant eux. Les pénitences ordinaires étaient des aumônes, et pour les fautes les plus graves, le prêtre frappait lui-même le coupable sur les jambes avec une verge. Accoutumés, selon les lois de l’étiquette coréenne, à fuir la vue des femmes de condition, les prêtres refusèrent d’abord de les confesser ; mais les instances furent si vives qu’il fallut y consentir. Ils ne faisaient pas la visite des chrétientés, mais on venait auprès d’eux leur demander les sacrements. Ils voyageaient à pied, et s’excitaient toujours à éviter le faste et l’orgueil.

À la capitale, Jean T’soi Koan-t’sien-i loua une maison pour l’administration des sacrements. Plein d’activité et doué d’une grande pénétration d’esprit, il réglait toutes les affaires, recevant les prêtres et préparant les chrétiens. Jour et nuit, il était occupé à ce ministère, sans redouter ni les embarras ni les fatigues ; il était comme le catéchiste général de la chrétienté. Son père, quoique ne pratiquant pas la religion, était loin de s’opposer aux nombreuses réunions qui se faisaient chez lui ; il les protégeait, au contraire, de tout son pouvoir.

Ce clergé coréen improvisé continua ainsi ses fonctions pendant près de deux ans, avec de grands succès et dans une parfaite bonne foi. Mais en l’année kei-iou (1789), certains passages des livres de religion, examinés plus minutieusement, firent naître dans l’esprit des prêtres et de l’évêque des doutes sérieux