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CHAPITRE IV.

Persécution de 1827 : interrogatoires de Pierre Sin et de Paul Ni. — Lettres de Paul.


Cependant de nouvelles dénonciations avaient été faites, vers le milieu de la quatrième lune, par-devant le juge de Tsien-tsiou, et plusieurs des personnes dénoncées demeuraient dans d’autres provinces. Or, d’après la loi, les tribunaux criminels ne peuvent arrêter un individu, sans l’autorisation du mandarin civil au district duquel il appartient ; quelquefois même il faut la permission du gouverneur de la province. Néanmoins, ils se dispensent souvent de cette formalité quand il s’agit des gens du peuple, et que l’accusé se trouve pour le moment dans le cercle de leur juridiction directe. Par suite de ces dénonciations, des satellites furent envoyés de Tsien-tsiou, tant à la province de Kieng-siang qu’à la capitale, pour saisir divers chrétiens, entre autres Pierre Sin et Paul Ni, dont nous allons raconter l’histoire.

Pierre Sin T’ai-po, déjà bien connu de nos lecteurs, après avoir pris beaucoup de peine pour les collectes relatives au voyage de Péking, ne se mêlait plus des affaires de la chrétienté, et vivait dans la retraite, uniquement occupé du salut de son âme[1]. Son nom toutefois était très-connu, et le grand nombre de livres qu’il avait transcrits devaient naturellement le compromettre plus que tout autre, en temps de persécution. Après avoir habité successivement en diverses provinces, il s’était enfin établi à Tsat-kol, au district de Siang-tsiou, province de Kieng-siang, où il vivait à l’écart, n’ayant que très-peu de relations avec les chrétiens du dehors. Néanmoins, lorsqu’il connut les progrès de la persécution de 1827, il comprit qu’il ne pouvait manquer d’être dénoncé, et fit ses préparatifs pour mettre en sûreté sa famille et sa personne. Le 22 de la quatrième lune, tout était prêt, et on

  1. Les chrétiens de l’époque ont souvent raconté que Pierre Sin étant encore catéchumène, fut tourmenté par plusieurs démons qui lui auraient apparu, et même l’auraient enlevé de l’appartement où il étudiait la religion. Ils cherchaient à le dissuader de recevoir le baptême. Pierre leur résista, et leur déclara que rien au monde ne pourrait l’empêcher de suivre la religion ; les démons furieux le rejetèrent à sa place avec une telle violence, qu’il en conserva toute sa vie une douleur dans les membres.