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Page:Dallet - Histoire de l'Église de Corée, volume 1.djvu/569

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plus nous revoir en ce monde ; que la volonté de Dieu soit faite ! En considérant les actions de toute ma vie, et mes nombreux péchés, je regrette surtout tout ce que j’ai eu à me reprocher envers vous ; pardonnez-le-moi. Bien que je meure, pourrais-je vous oublier ? Pour soutien ici-bas, il vous reste Tieng-ei et sa sœur ; élevez-les bien, instruisez-les et faites-leur suivre mes traces. Pour vous, si vous êtes soumise en toutes choses à la volonté de Dieu, si vous devenez amie du Seigneur, ne sera-ce pas là le vrai bonheur ? Depuis notre séparation, combien vous avez dû rencontrer de difficultés ! Quand cette pensée me vient, j’en suis accablé ; mais songeant de suite à Dieu et à Marie, je calme mes inquiétudes. Surtout tâchez tous de bien finir la vie. Avez-vous des nouvelles de Ien-p’ong ? Hélas ! hélas ! quand ma mère va apprendre mon état, que va-t-elle devenir ? Si je viens aussi à être martyr, quelle gloire pour elle, il est vrai, mais comment la nature pourra-t-elle se contenir ? Maintenant il faut vous quitter tout à fait, je n’ai plus de papier, et toujours sous les yeux des geôliers, je suis obligé de saisir à la dérobée quelques instants pour vous adresser ces deux mots ; veuillez les faire circuler dans la famille. Et mon frère aîné comment est-il ? Et ma belle-sœur aînée que je ne pourrai plus revoir ? Mon espoir est que nous nous rencontrerons et réjouirons ensemble au royaume du ciel.

« J’ignore si je mourrai ici ou à la capitale ; si je meurs ici, j’obtiendrai la palme sur le même lieu où ma sœur l’a cueillie ; quel bienfait ! Anges et Saints du Paradis, chrétiens de toutes les parties de la terre, daignez rendre grâces à Dieu pour moi. Chaque circonstance me rappelle le souvenir des lettres de cette chère sœur martyre, et la seule chose qui m’afflige, c’est le regret de ne pas avoir autant qu’elle aimé Dieu pendant ma vie. Maintenant, je voudrais commencera l’aimer, mais il est trop tard et qu’y faire ? J’en ai le cœur oppressé, mais si d’une part mes péchés sont sans nombre, la miséricorde de Dieu est aussi sans limites, voilà mon seul espoir. Par mes seules forces, je n’aurais pu tenir ferme même un instant. Non, maintenant plus que jamais, je reconnais qu’en toutes choses nos forces ne sont pour rien, et que la protection de Dieu fait tout.

« Quand la violence de la persécution sera un peu apaisée, venez chercher mes effets et donnez-les à mon fils. N’oubliez pas de faire rebaptiser mes deux enfants ; ils ne l’ont pas été sûrement. J’ai quelques dettes et des commandes auxquelles je n’ai pu satisfaire. Nulle parole ne saurait rendre ce que j’en éprouve ;