Page:Dante - L’Enfer, t. 1, trad. Rivarol, 1867.djvu/162

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Enfers pour y former le Styx, l’Achéron et le Phlégéton : enfin elles se précipitent, par cet étroit canal, dans le dernier gouffre de l’abîme, et prennent le nom de Cocyte [5].

— Puisqu’il est vrai, repris-je alors, que ce ruisseau traverse l’empire des ombres, pourquoi le voyons-nous pour la première fois ?

— Tu sais, me dit le sage, que les Enfers sont creusés en cercle, de degrés en degrés jusqu’au centre du monde, et quoique notre descente approche de son terme, nous n’avons vu que la dixième part de chaque enceinte : ainsi la révolution d’un cercle entier sera la mesure et la fin de notre voyage [6]. Ne sois donc pas surpris si les abîmes nous offrent encore des objets inconnus.

— Mais, repris-je aussitôt, le Phlégéton et le Léthé, ce fleuve d’oubli que vous n’avez point nommé, où sont-ils ?

— Apprends, répondit l’illustre poëte, que la rivière de sang t’a déjà montré le Phlégéton ; et, quant au fleuve d’oubli, n’espère pas le rencontrer dans ces gouffres : il arrose des lieux où le repentir, le pardon et l’espérance habitent [7]. Éloignons-nous, il est temps, des bords de la forêt : ce ruisseau, où les traits de flamme viennent s’éteindre, trace le sentier devant nous.