Page:Dante - La Divine Comédie, trad. Lamennais, 1910.djvu/211

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l’ordre de la pieuse montagne, ou qui soit inaccoutumée. Elle est exempte de toute altération : de ce qu’en soit le ciel reçoit d’elle [1] cela peut venir, et non d’autre chose : Car ni pluie, ni grêle, ni neige, ni rosée, ni bruine, ne tombe au-dessus du court escalier des trois degrés [2]. Ne s’y voient aucuns nuages, épais ou légers, ni éclairs, ni la fille de Thaumas [3], qui là [4] souvent change de contrées. Nulle sèche vapeur ne monte plus haut que le sommet des trois degrés dont je parlais, où le vicaire de Pierre a ses pieds. Peut-être plus bas tremble-t-elle un peu, ou beaucoup ; mais, par un vent qui dans la terre se cache, je ne sais comme, ici-haut le mont ne tremble jamais. Il tremble, lorsqu’une âme se sent pure, de sorte qu’elle monte, ou se meuve pour monter, et ce cri la seconde. De la pureté le seul vouloir fait preuve, l’âme tout à coup se sentant libre de changer de demeure, et de le vouloir elle se réjouit. Auparavant bien le voudrait ; mais ne le permet pas le désir par lequel veut la divine Justice qu’elle se porte vers le châtiment, comme au péché elle se porta. Et moi qui, cinq cents ans et plus, ai été gisant sous cette peine, tout à l’heure seulement j’ai senti le désir d’un séjour meilleur. Pour cela tu as senti le tremblement, et entendu les pieux esprits par tout le mont rendre gloire à ce seigneur, afin qu’il hâte leur passage là-haut ! ». Ainsi il dit : et comme on se réjouit d’autant plus de boire, que plus grande est la soif, je ne saurais dire combien il satisfit la mienne. Et le sage Guide : « Maintenant je vois le filet où ici vous êtes pris, et comme on s’en dégage, pourquoi le tremblement, et de quoi vous vous conjouissez. Qu’il te plaise maintenant que je sache qui tu fus ; pourquoi tant de siècles tu as été gisant, je l’ai compris par tes paroles.

— Au temps où le bon Titus, avec l’aide du souverain

  1. Ce que le ciel reçoit de la montagne du Purgatoire, ce sont les âmes qui montent dans la gloire, après qu’elles se sont entièrement purifiées.
  2. Les trois degrés qui sont au-devant de la porte du Purgatoire comme on l’a vu ch. IX.
  3. Iris ou l’arc-en-ciel.
  4. Qui , — sur la terre, — se montre tantôt en un lieu, tantôt en un autre.