Page:Dante - La Divine Comédie (trad. Artaud de Montor).djvu/275

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Nous continuâmes donc d’avancer ainsi qu’auparavant, et nous entrâmes dans le chemin avec moins d’hésitation, quand l’autre âme vertueuse y eut consenti. Les poètes marchaient en avant : je suivais leurs traces et j’écoutais des discours qui m’apprenaient les règles de leur science poétique ; mais ces entretiens pleins de charme furent interrompus par la vue d’un arbre que nous trouvâmes au milieu du chemin, et dont les fruits répandaient une odeur suave et agréable.

Le sapin diminue en s’élevant de branche en branche ; cet arbre, au contraire, s’amoindrissait à mesure qu’il se rapprochait du sol : c’était, je crois, pour que personne n’y put monter. Du côté où était intercepté le chemin que nous suivions, il tombait du rocher une onde claire qui baignait les feuilles de l’arbre mystérieux.

Les deux poètes s’en étant approchés, une voix qui sortit des feuilles cria : « Vous ne toucherez pas à cette nourriture. » Elle dit ensuite : « Marie, qui intercède maintenant pour vous, ne pensait pas à satisfaire un sentiment de gourmandise, mais voulait que les noces fussent honorables et complètes. Les anciennes Romaines se contentèrent d’eau pour boisson. Daniel méprisa les repas recherchés, et il acquit la science. Le premier siècle eut l’éclat de l’or ; la faim donnait de la saveur aux glands ; la soif donnait à chaque ruisseau le goût du nectar. Des rayons de miel sauvage et des sauterelles furent les seuls mets dont se nourrit Baptiste dans le désert ; c’est pourquoi il est environné de gloire, et aussi grand que le montre l’Évangile. »