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Page:Dante - La Divine Comédie (trad. Artaud de Montor).djvu/384

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ciel deux signes semblables à celui que forma la fille de Minos, quand elle sentit les glaces de la mort ; que ces signes t’offrent deux rondes en mouvement, confondant leurs rayons, et tournant sur deux plans contraires, tu auras ainsi en quelque sorte l’idée de la vraie constellation, et de la double ronde qui tournait autour du point que j’occupais, parce que là-haut notre imagination n’est pas plus propre à comprendre les prodiges célestes, que là-bas le cours de la Chiana n’approche du mouvement du ciel le plus rapide.

Autour de moi on ne chanta pas Bacchus, ni Pœan, mais trois personnes en une nature divine, et dans une personne la nature divine et la nature humaine réunies. Le chant cessa, les rondes achevèrent la mesure, et ces lumières bienheureuses, en se félicitant de voir un sentiment d’amour succéder à un sentiment de charité, se rapprochèrent de nous.

La lumière qui m’avait raconté la vie admirable du pauvre de Dieu rompit le silence, d’accord avec les ombres aimantes, et me dit : « Quand la première moisson est faite, et que le grain est déjà serré, une douce tendresse m’invite à faire l’autre moisson.

« Tu crois que chez celui à qui l’on ôta une côte, pour former cette belle bouche dont le palais fut si fatal au monde, chez celui qui, percé de la lance, offrit une satisfaction avant et après sa mort, et nous racheta de toute faute, la haute valeur qui les avait créés tous les deux unissait ce que la nature humaine peut posséder d’intelligence, et tu t’étonnes de ce que je t’ai dit déjà, qu’après l’esprit pieux qui est enfermé dans la cinquième sphère, il ne s’en est pas élevé un second.

« Écoute avec attention ma réponse : ce que tu crois et ce que j’ai dit s’accordent avec la vérité, comme un centre est à une distance égale de toutes les parties d’un objet arrondi.

« Les êtres qui ne meurent pas, et ceux qui peuvent mourir, ne sont qu’une création de l’idée souveraine, source de tout amour. Cette vive lumière, qui procède de son propre éclat, et qui ne peut se séparer ni d’elle-même ni de sa charité, avec laquelle elle ne forme qu’un seul être, répand ses rayons, par l’effet seul de sa bonté, dans neuf sphères qui la réfléchissent, et elle ne cesse pas d’être Une éternellement. Elle descend ensuite de sphère en sphère, jusqu’aux dernières puissances, et ne produit plus que des créatures de peu de durée.

« Par ces créatures, j’entends les êtres qui proviennent de l’influence du ciel, soit qu’ils aient été engendrés, soit qu’ils aient reçu autrement