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CHAPITRE II.

fugitif et corporel, ni à notre sensibilité organique, et indigne de purs esprits.

Ce n’est donc point inconvenant de déguiser les choses célestes sous le voile des plus méprisables emblèmes ; d’abord, parce que la matière tirant son existence de celui qui est essentiellement beau, conserve dans l’ordonnance de ses parties quelques vestiges de la beauté intelligible ; ensuite parce que ces vestiges mêmes nous peuvent ramener à la pureté des formes primitives, si nous sommes fidèles aux règles antérieurement tracées, c’est-à-dire, si nous distinguons en quel sens différent une même figure s’applique avec égale justesse aux choses spirituelles et aux choses sensibles.

V. Du reste la théologie mystique, comme on sait, n’emploie pas seulement ce langage saintement figuratif, quand il s’agit des ordres célestes, mais aussi quand elle parle des attributs divins. Ainsi, tantôt voilée sous les plus nobles substances, la divinité est le soleil de justice[1], l’étoile du matin dont le lever se fait au fond des cœurs pieux[2], ou la lumière spirituelle qui nous enveloppe de ses rayons : tantôt revêtant de plus grossiers symboles, c’est un feu qui brûle sans consumer[3], une eau qui donne la vie à satiété, et qui, pour parler en figure, descend en nos poitrines, et coule à flots intarissables[4] : tantôt enfin, déguisée sous des objets infimes, c’est un parfum de bonne odeur[5], c’est une pierre angulaire[6]. Même les Écritures la présentent sous des formes animales[7], la comparant au lion, à la panthère, au léopard et à l’ours en fureur. Mais il y a quelque

  1. Malach., 4, 2.
  2. Apoc., 22, 16.
  3. Exod., 3, 2.
  4. Joan., 7, 38.
  5. Cant., 1, 2.
  6. Ephes., 2, 20.
  7. Osee, 13, 7.