Page:Darien, Bas les coeurs, Albert Savine éditeur, 1889.djvu/214

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— Pas possible, dit mon père… Et vous avez été chez le général ?

― J’en viens. Et j’ai là…

Le vieux tire du fond de sa poche une large enveloppe enveloppée elle-même dans une feuille de papier bleu.

― J’ai là une lettre de grâce.

― Tous les prisonniers sont graciés ?

― Tous. Ils doivent être mis en liberté immédiatement… à l’exception du maire.

― Ah ! le maire ne sera pas mis en liberté ? Mais on ne le fusillera pas ?

― Non, non ; on se contentera de le garder à vue… C’est tout ce que j’ai pu obtenir…

― Ce pauvre Dubois ! fait ma sœur.

― Ah ! c’est bien malheureux, gémit mon grand-père… surtout pour moi. Nous n’étions pas bien ensemble, Dubois et moi, et il se trouvera encore de méchantes langues pour prétendre que je n’ai pas fait tout mon possible… Dieu m’est témoin, pourtant, que je me suis mis en quatre. J’ai pris le général par tous les bouts. Je me suis jeté à ses genoux en pleurant… J’aurais donné tout pour obtenir une grâce entière… Dans des moments pareils, on oublie tout, on ne se souvient plus des offenses ;