Page:Darien, Bas les coeurs, Albert Savine éditeur, 1889.djvu/302

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musiques qui jouent des marches triomphales ; ce sont les Prussiens qui reviennent, chantant à pleins poumons, traînant derrière eux des Français prisonniers.


― Maintenant, Paris doit se rendre, nous dit en rentrant chez nous un officier de dragons bleus que nous logeons depuis quelques jours.

Et nous comprenons que le dragon ne ment pas, que la chute de la capitale n’est plus qu’une affaire d’heures. Coup sur coup, l’ennemi nous apprend qu’une insurrection terrible a éclaté à Paris, le 22, que les Français ont été battus à Saint-Quentin et que l’armée de l’Est est en déroute. Nous sommes résignés à tout. Et, lorsque la nouvelle de la capitulation se répand dans Versailles, le 26, elle nous laisse presque insensibles.

Depuis quatre mois nous vivons complètement isolés, sans communications avec la province et avec Paris, sans nouvelles précises même des opérations qui ont lieu tout à côté de nous. Nous avons d’abord espéré, puis attendu la délivrance ; mais, peu à peu, le découragement nous a abattus, la démoralisation nous a gangrenés et affaiblis. Une torpeur