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Page:Darien - Biribi (Savine 1890).djvu/140

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— On devrait les leur enlever. Ils seraient forcés de suivre ou ils crèveraient de faim.

Je suis descendu, indigné, et je me suis assis à côté des autres qui attendent, à l’ombre des rochers, que les mulets soient passés pour se remettre en route.

Ils passent ; on entend le bruit de leurs sabots pesants qui frappent les cailloux, le cliquetis des chaînes qui les attachent deux par deux.


— En route ! dit l’Amiral au bout d’une dizaine de minutes.

Nous sortons de notre trou. Nous ne sommes pas les seuls traînards, comme l’avait prédit Barnoux. Au bas de la côte, on aperçoit encore des hommes qui ne sont pas décidés à la gravir. Et il faut monter, monter sans cesse, sous la chaleur grandissante, pour atteindre le col qui traverse la montagne. À un détour du chemin un homme est assis, s’essuyant la figure avec son mouchoir. Je le reconnais ; il me reconnaît aussi. C’est celui qui couchait dans mon marabout, à Zous-el-Souk, et auquel Queslier avait refusé de répondre, le soir de mon arrivée. Il me demande si je ne pourrais pas lui donner une gorgée d’eau. Pris de pitié, bien que l’individu ne m’inspire guère d’intérêt, je mets la main à mon bidon qui est encore presque plein. Mais Queslier m’a prévenu. Il a ramassé une grosse motte de sable et l’a brisée sur la tête du misérable en criant :

— Les vaches, voilà ce qu’on leur donne à boire !

Il se tourne vers moi.

— Ça t’étonne, ce que je fais là, n’est-ce pas ? Ça te semble dur ? Eh bien ! réfléchis un peu à ce qu’il a fait, lui, pour se concilier l’estime des gradés, pour