Page:Darien - L’Épaulette, Fasquelle, 1905.djvu/30

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Des cris me réveillent dans la petite chambre, contiguë à celle de ma mère, où je viens de m’endormir.

— Monsieur ! Monsieur !… Pour l’amour de Dieu, venez vite !… Jean-Baptiste !… Dites à Jean-Baptiste de courir chercher le docteur. Vite ! Vite !… Ah ! mon Dieu ! Mon Dieu ! Ah ! mon Dieu !…

Qu’y a-t-il ? Je me lève et, à tâtons dans l’obscurité, je me dirige vers la porte que j’essaye d’ouvrir. Elle est fermée. Je voudrais crier, mais je ne peux pas ; quelque chose m’en empêche et je reste là, haletant, prêtant l’oreille. Je ne distingue plus rien que des bruits confus, des chuchotements.

Le froid me gagne. Je retourne à mon lit, bien décidé à rester éveillé ; mais le sommeil, naturellement, a bientôt raison de ma volonté. Je ne sais pas combien de temps je dors, plusieurs heures sans doute, mais un grand cri tout à coup me réveille ; d’autres cris ; les cris d’une femme ; puis des sanglots. Et puis, je perçois une voix d’homme, une voix lourde, lente, comme voilée, la voix de mon grand-père.

— Ma pauvre Cécile ! Ma pauvre Cécile !…

Au matin, on me fait habiller rapidement et l’on me conduit chez une dame qui me retient près d’elle sous des prétextes variés et qui ne me reconduit à la maison que le lendemain dans l’après-midi. J’ai été très calme chez cette dame ; je suis resté sombre, seulement, et taciturne. Mais quand Lycopode, tout de noir vêtue, vient ouvrir la porte, je me jette dans ses bras et j’éclate en sanglots ; j’ai une terrible crise qui dure encore quand mon père un crêpe à la manche, et mon grand-père, vêtu de deuil, entrent dans le salon où l’on m’a transporté.

— Maman ! Maman ! Où est maman ?