— Voyons ; les Français avaient été battus le 28 novembre à Beaune-la-Rolande, et le 2 décembre à Loigny… En fait, je m’en souviens très bien maintenant, c’était le surlendemain de la reprise d’Orléans par nos troupes. Nous ne poursuivions que fort mollement l’armée française qui battait en retraite sur Vendôme, démoralisée et dans le plus grand désordre… Ce matin-là, donc, à l’aube, nous fûmes avertis qu’un corps français, qu’on évaluait à 1.500 hommes environ, avec du canon, avait pris position pendant la nuit à Nourhas, un gros village sur notre droite et complètement en dehors de la ligne de retraite. L’information nous sembla tellement invraisemblable que nous refusâmes d’abord d’y ajouter foi. Mais, comme elle fut bientôt confirmée par une reconnaissance de cavalerie, il fut décidé que trois bataillons et une batterie iraient attaquer immédiatement. Je partis avec ces troupes, placées sous le commandement du colonel von Kern. Nous n’étions guère qu’à un kilomètre de Nourhas lorsque le brouillard, qui jusque-là avait été assez épais, se leva. Nous pûmes apercevoir les bivouacs des Français, sur la grande plaine qui s’étend en avant du village ; ces malheureux bivouaquaient ainsi toutes les nuits, leurs officiers craignant, s’ils les laissaient pénétrer dans les maisons, de ne pouvoir les en faire sortir. Ils semblaient n’avoir pris aucune des précautions les plus élémentaires. Point de grand’gardes, pas même de sentinelles ; aucun officier n’était visible. On ne voyait nulle trace de travaux de défense, de retranchements ; on aurait pu les distinguer facilement car la neige, dont une couche épaisse couvrait le sol, avait cessé de tomber depuis la veille. Un bataillon fut envoyé sur la gauche, à travers champs, de façon à occuper le chemin vicinal qui rejoint la route de Vendôme, au sud du village ; l’artillerie alla au galop prendre position sur les talus de la route ; deux compagnies se déployèrent en tirailleurs, avec une troisième en soutien.