Page:Darien - La Belle France.djvu/150

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nombreuses, des évidences indiscutables, s’élèvent contre elles, d’avance. D’ailleurs, il existe une excellente raison de démocratiser l’armée, d’en faire enfin l’armée du peuple : c’est le peuple qui paye pour elle ; c’est le peuple qui sert dans cette armée, gratuitement ; c’est lui qui, payant l’impôt, et tout l’impôt, entretient cette armée et en assure l’existence. C’est à lui qu’elle doit appartenir. Elle appartient aux parasites qui vivent de lui. Ils en ont fait non seulement un instrument de domination, d’oppression et de menace, mais une sorte de propriété privée dont ils jouissent en bonnes crapules de pères de famille, eux et leurs petits, et les petits de leurs femmes, et les petits des bons moines ; ils en vivent, s’en gavent et s’en engraissent ; tout cela est tellement ignoble que j’ai presque honte d’en parler. Je ne sais pas si l’on est fier d’être Français quand on regarde la colonne (ça se pourrait tout de même, si on lui faisait refaire la planche) ; mais je sais qu’on est vraiment dégoûté d’être Français quand on pense qu’un propre-à-rien, parce qu’il a porté sur sa manche des loques de lustrine ou des galons d’or, aura son existence largement assurée ; et qu’un ouvrier ou un artiste, un homme qui n’aura pas contribué à l’œuvre d’abâtardissement social qui fait de la France une guenille de nation, se verra donner le choix, sur ses vieux jours, entre la pourriture de l’hôpital et la fange du ruisseau.

Oui, ce qui existe en France existe ailleurs. Oui. Et puis ? Ne nous vantons-nous pas, dites donc, d’être le premier peuple du monde, les chevaliers de la liberté et les champions de l’égalité ? Faudrait faire voir ça, un peu. C’est joli, les paroles ; mais des actes vaudraient mieux. Nous nous targuons d’avoir donné beaucoup d’exemples à l’univers, et il y a sans doute un peu de vrai dans toute cette forfanterie ; donnons-lui un exemple de plus. Montrons-lui qu’une République peut être une République, quelque invraisemblable que cela paraisse ; faisons-lui voir qu’une armée nationale peut être une armée nationale, et même une armée.

La guerre, alors ? Pourquoi pas ? Pourquoi les prolétai-