Page:Darien - La Belle France.djvu/151

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res n’iraient-ils pas se faire se tuer, puisqu’ils s’obstinent à ne pas vouloir vivre ? Tout serait préférable pour eux à la léthargie présente, et si la paix ne leur donne point l’énergie qui leur est nécessaire, ils pourront peut-être la trouver dans les horreurs de la guerre. Je me suis souvent demandé comment les déshérités ne s’aperçoivent pas qu’ils ont tout à gagner à une guerre. Le sens politique leur manque ; et les nullités, à longues barbes et à cerveaux réduits, qui les dirigent ne savent que les aveugler de conceptions chimériques, de théories compliquées et grotesques, et les empêchent, hélas ! de voir les choses telles qu’elles sont. Ce sont les riches, les dirigeants, qui n’ont pas d’intérêt à la guerre, qui ne la désirent pas, qui en repoussent l’idée avec horreur, avec une angoisse qu’ils ne prennent plus la peine de dissimuler.

Déroulède lui-même, l’émonctoire de la revanche, le chantre des luttes d’hier et de demain, sorti tout infect avec sa lyre de fer battu (battu par les Prussiens) du puisard où marine le patriotisme bourgeois dans le sang des misérables — Déroulède, le patriote, le vaillant, le poète, le prestigieux Don Quichotte — Déroulède, l’ambitieux burlesque, le sombre imbécile, l’assassin des ouvriers de Paris, l’hypocrite croque-mort des rimes putréfiées — Déroulède déclarait l’autre jour, la main sur le scapulaire qui lui sert de conscience, qu’il ne veut pas la guerre. Il veut toujours reprendre l’Alsace-Lorraine, bien entendu, dans dix ans, dans vingt ans ou dans cent ans ; dans cent ans, ça ne le gêne pas ; mais il ne veut point la guerre. Ne pas vouloir la guerre, voilà sa véritable mission. Il est là pour ça, pour ne pas vouloir la guerre ; et c’est pour ça qu’il nous assourdit depuis si longtemps de ses déclamations revanchardes et qu’il nous empoisonne impitoyablement de sa patriotique charogne. Il ne veut pas la guerre !… Ô malheureux, vous qui avez souffert l’horrible misère sous tous les aspects qu’elle sait prendre, vous qui êtes morts de fièvre sous l’uniforme ou morts de faim sous les haillons, vous tous qui avez donné vos peines, vos sueurs et vos existences aux fantômes de la revanche exhibés par cet impresario de