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Page:Darmesteter - La chute du Christ, 1879.djvu/14

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nous agite, ce poème, de sentiment biblique et de pensée positive, combinaison tout anglaise de Milton et de Spencer, trouvera même en France, surtout en France, nombre d’esprits préparés pour le comprendre.

Cette œuvre étrange est inspirée d’une admirable prophétie d’Isaïe, qui montre Nabuchodonosor descendu aux enfers après tous les rois dont il a précipité la ruine, et salué par leurs huées triomphales : Ergo vulneratus es sicut et nos, factus es similis nostri. — « Te voilà donc blessé comme nous, te voilà donc semblable à nous. » L’auteur a transporté la scène, des rois d’autrefois aux dieux d’autrefois, et de Nabuchodonosor au Christ. Le Dieu chrétien, tué à son tour par l’homme, après tous les dieux que l’homme avait autrefois tués pour lui, vient rejoindre dans l’enfer ses victimes, qui le saluent par le même cri de vengeance : Ergo vulneratus es sicut et nos… De cette fiction audacieuse le poète dégage une grande pensée, l’écoulement éternel de la matière divine, la souveraineté de l’homme sur ses dieux qu’il crée, puis qu’il détruit, et il essaie d’entrevoir le destin futur de l’humanité, veuve du Christ.

La Bible étant en France un livre plus célèbre que connu, nous croyons utile de donner la traduction du passage dont le poème est inspiré,