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CONCLUSIONS FINALES.

faculté du mouvement à la suite d’une excitation. Toutefois, il faut se rappeler que les feuilles et leurs homologues, aussi bien que les pédoncules des fleurs, ont dans d’innombrables cas acquis cette faculté indépendamment de toute hérédité d’un ancêtre commun ; par exemple, les plantes portant des vrilles et celles qui grimpent au moyen de leurs feuilles, c’est-à-dire les plantes dont les feuilles, les pétioles, les pédoncules des fleurs, etc., se sont modifiés pour la préhension : ces plantes appartiennent à un grand nombre des ordres les plus distincts. Les feuilles de beaucoup de plantes qui dorment la nuit ou qui se mettent en mouvement à la suite d’un attouchement ; les étamines et les pistils irritables de beaucoup d’espèces sont dans le même cas. Nous pouvons donc conclure que la faculté du mouvement peut s’acquérir facilement par divers moyens. Ces mouvements impliquent l’irritabilité ou la sensibilité ; toutefois, comme l’a fait remarquer Cohn[1], les tissus des plantes douées de ces facultés n’ont pas un caractère commun qui les différencie de ceux des plantes ordinaires ; il est donc probable que toutes les feuilles sont plus ou moins irritables. Quand un insecte se pose sur une

    à laquelle il donne naissance, les choses se passeront exactement de la même manière ; c’est ainsi que M. Van Tighem a pu nourrir des embryons de Belle de nuit extraits de la graine et séparés de leur albumen au moyen d’une pâte de fécule ou de sarrazin.
    La similitude de la nutrition dans les deux règnes nous explique pourquoi certains produits : les acides butyrique, formique, palmitique, oxalique, leur sont communs. On s’explique de même l’unité de structure organique, du protoplasma, dans les deux règnes ; il est la base et la cause de leur activité vitale. Ainsi les phénomènes des plantes carnivores sont un cas particulier d’une fonction générale. Chez elles la pepsine se sécrète à la surface de même que la levure de bière (Saccharomyces cerevisiæ) excrète le ferment inversif du sucre de canne. Seulement les faits constatés chez les Drosera et qualifiés légèrement par des juges incompétents ou prévenus, ont eu pour résultat de nous ouvrir de nouveaux horizons sur la physiologie comparée des deux branches du règne organisé, les végétaux et les animaux.

  1. Voir l’extrait de son mémoire sur les tissus contractiles des plantes dans les Annals and Magaz. of Nat. hist., 3e  série, vol. XI, p. 188.