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Page:Darwin - De la variation des animaux et des plantes sous l'action de la domestication, tome 1, 1868.pdf/444

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ACTION DIRECTE DE L’ÉLÉMENT MÂLE

pour la saturation du pistil et de l’ovaire, — la formation générale de ce dernier et des enveloppes des graines dans les plantes hybrides et stériles, — et les observations du Dr Hildebrand sur les Orchis, nous pouvons admettre que, dans la plupart des cas, l’action directe du pollen facilite, si elle n’en est la seule cause, le gonflement de l’ovaire et la formation des enveloppes des graines, indépendamment de son action fécondante. Nous n’avons donc, pour les cas ci-dessus énoncés, qu’à accorder au pollen, outre sa propriété de favoriser le développement de l’ovaire et des enveloppes des graines de sa propre plante, celle d’influencer la forme, la grosseur, la couleur, texture, etc. de ces mêmes parties, lorsqu’il est mis en contact avec la fleur d’une autre espèce ou variété.

Venons-en maintenant au règne animal. Si une même fleur pouvait donner des graines pendant plusieurs années consécutives, il n’y aurait rien d’étonnant à ce qu’une fleur, dont l’ovaire aurait été modifié par un pollen étranger, donnât ensuite, fécondée par elle-même, naissance à des produits modifiés par l’action de l’élément mâle antérieur. Or, c’est ce qui a été effectivement observé sur les animaux. Un cas souvent cité est celui de lord Morton[1] ; une jument alezane, de race arabe presque pure, après avoir été croisée avec un quagga, et mis bas un métis, fut remise à sir Gore Ousely, qui, ultérieurement, en obtint deux poulains par un cheval arabe noir. Ces poulains furent partiellement isabelles, et avaient les jambes plus nettement rayées que le métis, et même que le quagga. Les deux avaient aussi le cou et quelques autres parties du corps portant des raies bien marquées. Les raies sur le corps, et la couleur isabelle sont très-rares chez nos chevaux d’Europe, et inconnues chez les Arabes. Mais ce qui rend le cas très-frappant, c’est que chez les deux poulains, les poils de la crinière étaient courts, roides et dressés, exactement comme chez le quagga. Il n’y a donc aucun doute sur le fait que ce dernier a nettement affecté les caractères de la progéniture ultérieurement procréée par le cheval arabe noir[2]. On

  1. Philos. Transact., 1821, p. 20.
  2. Alex. Harvey ; A remarkable effect of Cross-Breeding, 1851. — Physiology of Breeding, par R. Orton, 1855. — Intermarriage, par A. Walker, 1837. — L’Hérédité naturelle, par Dr P. Lucas, tom. II, p. 58. — W. Sedgewick, dans British and Foreign Medico-Chirurgic. Review, 1863, p. 183. — Bronn, Geschichte der Natur, 1843, vol. II, p. 127, a recueilli