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idiot qui, pour attraper les poux, se servait indifféremment de sa bouche ou de ses mains. Les idiots ont d’ordinaire des habitudes dégoûtantes ; ils n’ont aucune idée de la décence ; on a remarqué que certains avaient le corps couvert de poils[1].


Retour ou Atavisme. — Nous aurions pu introduire dans le paragraphe précédent la plupart des cas que nous avons à citer ici. Lorsqu’une conformation subit un arrêt de développement, mais qu’elle continue à s’accroître jusqu’à ressembler beaucoup à quelque structure analogue qui existe chez certains individus inférieurs adultes du même groupe, nous pouvons, à un certain point de vue, considérer cette conformation comme un cas de retour. Les individus inférieurs d’un groupe nous représentent, dans une certaine mesure, la conformation probable de l’ancêtre commun de ce groupe ; on ne saurait guère croire, en effet, qu’une partie, arrêtée dans une des phases précoces de son développement embryonnaire, pût être capable de croître jusqu’à remplir ultérieurement sa fonction propre, si elle n’avait acquis cette aptitude à grossir dans quelque état antérieur d’existence, alors que la conformation exceptionnelle ou arrêtée était normale. Nous pouvons, en nous plaçant à ce point de vue, considérer comme un cas de retour, le cerveau simple d’un idiot microcéphale, en tant qu’il ressemble à celui d’un singe[2]. Il est d’autres cas qui se rattachent plus rigou-

  1. Le professeur Laycock résume le caractère animal des idiots en les appelant théroïdes (Journal of Mental Science, juillet 1863). Le docteur Scott (The Deaf and Dumb, 2e édit. 1870, p. 10) a souvent observé les idiots qui sentent leurs aliments. Voir, sur le même sujet et sur le système poilu des idiots, Maudsley, Body and Mind, 1870, pp. 46-51. Pinel a aussi cité un cas intéressant.
  2. Dans mon ouvrage sur la Variation des Animaux, etc. (vol. II, p. 60), j’ai attribué au retour les cas de mamelles supplémentaires, qui ne sont pas excessivement rares chez la femme. J’avais été conduit à cette conclusion probable, parce que les mamelles additionnelles sont généralement situées symétriquement sur la poitrine, et surtout par le cas d’une femme, dont la seule mamelle effective occupait la région inguinale, fille d’une autre femme pourvue de mamelles supplémentaires. Mais le professeur Preyer (Der Kampf um das Dasein, 1869, p. 45) constate qu’on a trouvé des mamelles errantes dans d’autres situations, même sur le dos, dans l’aisselle, et sur la cuisse ; les mamelles dans ce dernier cas ont produit assez de lait pour nourrir l’enfant. Il est donc peu probable qu’on puisse attribuer au retour des mamelles additionnelles ; cependant cette explication me semble encore assez probable, parce qu’on trouve souvent deux paires de mamelles disposées symétriquement sur la poitrine ; on m’a communiqué plusieurs cas à cet effet. On sait que plusieurs Lémuriens ont normalement deux paires de mamelles sur la poitrine. On a observé cinq cas chez l’homme de plusieurs paires de mamelles, bien entendu rudimentaires ; voir Journal of Anat. and Physiology, 1872, p. 66 pour un cas cité par le docteur Handyside dans lequel deux frères possédaient cette particularité ; voir aussi un mémoire par le docteur Bartels, dans Reichert’s and du Bois Reymond’s Archiv, 1872, p. 304. Dans un des cas cités par le docteur Bartels, un homme avait cinq mamelles, l’une occupait une position médiane et était placée